Mercredi d’HaudaCity : la pratique de la musique

Les mercredis d’Haudacity sont ouvert à toute personne en situation de handicap, quel que soit le handicap. Pour garantir une bonne fluidité dans les échanges, le nombre de participants est volontairement limité à 8, auxquels s’ajoutent un invité et un « expert ». Contre toute attente, pour cette première édition, consacrée à la pratique musicale, l’ensemble des participants étaient en situation de handicap visuel.

Après un tour de table pour faire connaissance, Magali Viallefond, l’experte de cette session, nous a présenté l’association MESH (Musique Et Situations de Handicap), qu’elle a fondée en 1984 et dont elle est l’actuelle présidente d’honneur. MESH travaille à l’amélioration de l’accessibilité des pratiques musicales quel que soit le handicap. Ils s’adressent à l’ensemble des pédagogues, aux établissements spécialisés, mais aussi aux collectivités locales, et bien sûr, aux personnes handicapées (ou leurs parents) souhaitant pratiquer la musique. L’activité de cette association est très complète, mais en synthèse on peut retenir que MESH dispose d’un pôle Ressources permettant d’accompagner les professionnels et particuliers, et un pôle Formation à destination des enseignants. Orientation, conseil et médiation forment une grande partie de leur activité. Bon à savoir, ils conçoivent et produisent des ressources spécialisées (films, un guide sur les pratiques musicales …). Pour en savoir plus, www.mesh.asso.fr

Notre invitée, Claire P, altiste au sein de l’Orchestre National du capitole de Toulouse et enseignant « autodidacte » (comme elle se qualifie elle-même) va dans le sens de Magali, il y a selon elle une multitude de chemins possibles pour enseigner, car d’un élève à l’autre les chemins à emprunter peuvent être différents, la base de la pédagogie est de savoir s’adapter.

Après cette présentation, nous avons abordé les thèmes suivants :

• Comment se former et auprès de qui se former ?
• Comment accéder aux partitions lorsqu’on est très malvoyant ou aveugle ?
• Le handicap influence t’il le choix de l’instrument pratiqué ?

 

 

Comment se former ?

Il fut un temps où enseigner la musique à un enfant déficient visuel était l’apanage des enseignants aveugles ou malvoyants. Ce n’est plus le cas.

Aucun des participants à notre réunion ne prend de cours auprès d’un enseignant déficient visuel. Certains se forment auprès d’enseignants valides, une participante le fait via une application sur tablette (Simply Piano).

Chacun est d’accord pour dire qu’il faut surtout trouver l’enseignant qui sera « prêt à tenter l’aventure », le challenge demande une bonne dose de volonté, tant pour l’enseignant que pour l’élève. Il y a une multitude de chemins possibles pour la pratique musicale, chacun doit trouver le sien.

 

 

Comment accéder aux partitions ?

Pour les déficients visuels, c’est là un réel problème. Chacun cherche une solution avec les moyens dont il dispose.

Très souvent, il faut une aide extérieure pour prendre connaissance de la partition.

Jean-Philippe apprend la guitare, il enregistre en audio son prof qui lui explique la partition en disant à haute voix chacune des notes à jouer, leur valeur (noire, blanche, croche, etc) et décrit le doigté à utiliser sur l’instrument, une audiodescription en quelque sorte !

Jacques, apprend l’accordéon, là encore, le travail se fait grâce à un enregistrement audio : son enseignant lui joue le morceau une 1^ère fois, puis joue des groupes de mesures, puis donne note par note les indications, le tout est enregistré par l’élève qui peut ainsi réécouter les explications à loisir.

Edith utilise l’application Simply Piano et, grâce à un reste visuel, elle peut utiliser un écran suffisamment grand pour lire les notes.

Elisa, 8 ans, apprend le piano avec un enseignant « classique » qui a imaginé une manière de procéder pour lui faire découvrir et mémoriser le clavier du piano afin qu’elle prenne ses repères et en même temps développe son oreille musicale.

Pascale, apprend le violon alto, elle scan les partitions qu’elle transfère sur une tablette ce qui lui permet de les agrandir assez pour arriver à voir la portée de notes.

Dans tous les cas, il faut apprendre le morceau par cœur, car évidemment la lecture à vue est impossible !

Aucun des participants n’utilise le Braille musical, réputé compliqué et difficile à apprendre à l’âge adulte… Il existe des associations qui peuvent vendre ou transcrire sur demande des partitions en braille musical, mais il faut compter un délai pour leur fabrication, et un coût supplémentaire évidemment… mais au moins cela existe.

Un logiciel d’édition de partitions en Braille existe, Braille Music Editor (BME), mais aucun participant à la réunion n’en avait connaissance.

Voici un article intéressant qui le présente BME Braille Music Editor : une solution pour l'accessibilité à l'information musicale par les non voyants (jussieu.fr)

Attention l'article date de 2002. Voici le site du fabriquant sur lequel vous pouvez télécharger le BME2 (version 2 depuis 2012 apparemment, je n'ai rien vu de plus récent). Attention, site web en italien ou anglais. Bme2 | Veia progetti...

 

 

Le choix d’un instrument de musique

Certains ont choisi en fonction de leurs goûts, sans se poser la question du handicap, ou du moins, sans que ce soit un frein à priori.

La maman d’Elisa, quant à elle, a dû choisir en fonction des enseignants disponibles dans sa commune (une ville de taille moyenne) et volontaires pour enseigner à sa fille.

 

En conclusion de cette réunion, il ressort que la différence ne doit pas être vue comme un obstacle mais comme une richesse dans la pratique musicale. Les personnes en situation de handicap ont beaucoup de choses à apporter aux musiciens et enseignants valides. Magali, présidente de l’association MESH, hautboïste, pédagogue et enseignante chercheur à la retraite, nous a confié que, dans sa vie professionnelle, les personnes handicapées ont été pour elle des enseignants de valeur.

 

A lire 

A propos du braille musical : La clé de la musique en six points combinés, par Martin Huwyler, 2017 , https ://www.tactuel.ch/fr/la-cle-de-la-musique-en-six-points-combines/